Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Sébastien Fritsch, Ecrivain
16 novembre 2007

Journal d’un écrivain baladeur (4)

Le week-end dernier, j’étais au Salon du Livre de Lyon (qui s’intitule « Place aux Livres ! ». Le point d’exclamation est important !) qui se tenait entre Saône et Rhône, sur la place Bellecour.

Je ne vous raconterai pas mon voyage ni ne vous parlerai de la musique que j’ai pu écouter dans la voiture en y allant, ni ne vous décrirai les paysages des splendides contrées traversées dans mon bolide au design futuriste. En fait, j’ai pris le bus 14 et le trajet à duré dix minutes. Juste le temps de lire quelques pages du roman de Solenn Colléter. Heureusement, le terminus de la ligne 14 est justement « Bellecour » : je ne risquais donc pas de rater mon arrêt à cause de l’écrivaine bretonno-toulousaine qui me tenait entre ses lignes. Par contre, dimanche matin, j’ai trouvé le parcours trop bref : j’ai dû descendre alors que j’en étais au passage où…

Je ne parlerai donc que du salon lui-même. Enfin, je n’en parlerai pas vraiment : j’écrirai plutôt, pour économiser mes cordes vocales qui ont été mises à rude épreuve : je n’ai jamais autant blablaté.


Ce fut indispensable pour présenter mon livre, bien sûr. Et je crois que je ne l’ai jamais présenté dans un salon avec une fréquence aussi soutenue. Le fait que je sois juste en face de l’entrée (Mmmh, le douillet petit courant d’air glacé !) y fut pour beaucoup. Nombreux furent en effet les visiteurs dont le regard fut attiré (happé, aimanté, scotché, ventousé, envouté, enventousé) par la couverture rouge traversée d’une épée du "Mariage d’Anne d’Orval."

Certains se laissèrent convaincre immédiatement, d’autres m’écoutèrent avec attention puis m’indiquèrent qu’ils préféraient voir l’ensemble du salon avant de se décider. Dans cette dernière catégorie, nombreux furent ceux qui ne revinrent pas, évidemment, puisque la phrase « Je fais un tour et je reviens » et l’excuse la plus efficace pour fausser compagnie poliment à l’auteur qu’on trouve inintéressant.

Mais d’autres parmi ceux qui voulaient « faire un tour », revinrent vraiment. Parfois au bout d’une demi-heure, parfois au bout d’une heure. Ils avaient vraiment fait le grand tour. Certains avaient des sacs déjà pleins à craquer et ajoutaient mon roman à la pile de leurs lectures prochaines. D’autres revenaient les mains vides. Ils avaient tout vu, mais n’avaient rien acheté. Et ils revenaient souvent avec une petite phrase, du genre « Vous m’avez convaincu ». Mais avant même qu’ils la prononcent, je voyais dans leur regard, dans leur sourire, une note de complicité qui révélaient mieux encore leurs intentions. Et quoi de mieux, quand on parle d’un livre, que de voir naître la complicité entre le lecteur et l’auteur ? Enfin, moi, en tout cas, j'aime ça.

J’ai aussi vendu les romans des autres. Notamment ceux de Martine Maury. Elle n’était pas présente ce week-end, alors j’ai essayé, puisque ses trois romans jouxtaient les miens, de la défendre de mon mieux. Et j’avais d’ailleurs l’impression de la défendre mieux que mon propre roman (j’ai toujours peur de trop dévoiler mon intrigue). Ce ne fut pas très diffiicile, en fait, puisque sa trilogie m’avait énormément plu.

Dans certains cas, pourtant, je n’ai pas eu besoin de dire le moindre mot : j’ai effectivement vu deux personnes se jeter carrément sur le premier tome des œuvres de Dame Maury. Le titre en est « Mathilde ou les écirs de la passion »(*) : les deux personnes avaient une fille qui se prénommait ainsi (« Mathilde » pas « Ecir »).

J’ai aussi été interrogé par trois personnes (dont une pendant dix bonnes minutes) au sujet de « Comment c’est-y donc qu’on trouve un éditeur, mon bon monsieur ? »

C’était assez amusant, en étant publié depuis seulement six mois, d’être mis dans la position de donner sinon des conseils, du moins des pistes.

Je me suis contenté de parler de ce que j’ai vécu moi-même, et donc de la façon dont j’ai trouvé mes deux éditeurs : un par la poste, l’autre sur la place du marché (si, si, je vous jure, ça se passe comme ça ! En tout cas dans 100 % des cas des écrivains qui habitent chez moi). J’ai essayé d’expliquer quels enseignements j’avais tirés de quinze années de recherche infructueuses d’éditeurs, j’ai aussi donné quelques noms d’organismes ou d’associations qui pourraient compléter les maigres informations que je fournissais. Il n’était pas certain que mes paroles soient d’une grande utilité (chaque cas est différent et les écrits de mes interlocuteurs étaient peut-être impubliables) mais j’étais quand même content d’avoir pu tenter de rendre service. Ne serait-ce qu’en tendant une oreille attentive et en échangeant avec ces personnes sur ce point commun qui nous unissait : la passion de l’écriture.

En plus de tout cela, j’ai eu aussi à répondre à de nombreuses questions surprenantes et/ou amusantes :

- Anne d’Orval, est-ce un homme ou une femme ?

- Il est sorti le livre de Grég0ry Lem@rchal ?

- Ça vous plait la carotte musicale ? (**)

- Vous avez quatre enfants ! Ils s’appellent comment ?

- C’est quoi votre signe zodiacal ?

- La sortie, c’est où ? (sept fois)

Mais le meilleur moment fut quand j’ai vu se profiler les bouilles de la marmaille. C’était le premier salon qui soit suffisamment proche pour que ma femme puisse me rendre visite avec les "gones", comme on dit aux environs de la place Bellecour. Je leur en parle, évidemment, bien souvent à mes p'tits de ces salons du livre que j'écume (trop souvent à leur goût, même) alors ils furent ravis de voir comment ça se passait.

Ils adorèrent aussi déambuler entre les stands, se faire dédicacer des albums de BD (avec un dessin rien que pour eux !) et repartir les bras chargés de bouquins. Mais ne vous inquiétez pas, il reste encore de la place à la maison pour continuer à faire croître le stock de lecture.

(*) Le mot « Ecir » existe bel et bien : ce n’est pas une faute de frappe. Si vous voulez savoir ce que ça veut dire, vous n’avez pas d’autre solution que d’acheter le livre de Martine Maury. Eh oui, je suis un commercial né, moi.

(**) La carotte musicale existe également. Et d’ailleurs, faire passer un écir dans la carotte musicale pourrait sans doute produire un bel effet. Pour tout vous dire, il y avait, dans un coin du salon du livre, un musicien/auteur qui présentait son livre sur les instruments de musique taillés dans des légumes. Et c’était assez impressionnant, je dois le dire. Les sons rendus par les carottes percées et autres navets creusés étaient très mélodieux. Bon, évidemment, au bout de deux jours, ça devient un tout petit peu… comment dire… répétitif. De ce fait, quand le musicien passa près de mon stand (situé face au sien, à deux rangées d’écart : je n’avais donc pas perdu une miette de son récital) et me demanda. « Ça vous plait la carotte musicale ? » j’ai simplement répondu : « C’est très… original. »

L’écrivain baladeur est parfois un peu faux jeton, je trouve.

Publicité
Commentaires
S
@ Tilu, merci de ta visite et de ton commentaire (dont j'apprécie d'autant plus la valeur qu'il est rare). Je ne suis pas non plus très bavard dans la vraie vie (mais je me fais violence pour parler dans les salons du livre). Cet échange est donc une conversation de "taiseux". A l'écrit, c'est plus facile.
Répondre
T
C'est chouette de vivre un salon du livre de l'autre côté du..stand... J'ai souvent arpenté les allées des salons ou journées du livre de mon coin... mais le vivre à travers tes yeux et tes mots est trés interessant...Je ne suis pas très bavarde dans la vraie vie.. si,si c'est vrai... et c'est trés rare que j'échange avec les ecrivains qui exposent.... Ton billet me donne envie de le faire...
Répondre
Publicité
Derniers commentaires
Publicité